Une introduction pour le jeu de rôle Hurlement écrite pour une de mes joueuses :
"L'EVEIL
Un Hurlement.
Un Hurlement déchire tes sens.
La douleur
Le Noir. Le Rouge. Un éclair de conscience.
Une sensation pénible traverse ton corps pour exploser dans ton crâne.
Tous tes muscles se réveillent douloureusement. Tu les découvres un à un, dur comme du bois.
Tu bouges. La douleur te rappelle à l'ordre. Suppliciée, tu te recroquevilles. Tu renonces à tous mouvements.
Tu as froid, très froid et la chaleur s'échappe de ton corps.
Tu es pris de tremblement incoercible et douloureux.
Tu reprends vie.
La conscience.
Tu as mal dans un corps dont tu ignores si tu en es propriétaire.
Tu retournes tes pensées mais n'y trouve aucun souvenir, seulement quelques images déchirés d'une fuite...
Une fuite éperdue... une fuite contre la Mort.
La peur t'attrape. Tes entrailles se serrent. Tu deviens soudain un animal traqué. Tes pensées s'embrouillent sous la panique. Tu ne bouges pas. Tu restes prostrée et tu écoutes.
L'ouïe
Les bruits que tu entends sont étonnements clairs et nets.
Tu entends une mer d'arbres qui craquent et bruissent tout autour de toi.
Tu entends des animaux qui grattent le sol à la recherche de nourritures, certains qui se cachent en respirant bruyamment, d'autres qui courent ou d'autres encore qui poursuivent ceux qui courent. Ils vivent sans se soucier de toi à part peut-être certains qui se demandent si tu es comestible. Mais ils ne te traquent pas. Pas encore...
Tu trembles. L'air que tu inspires est glacé.
L'odorat
Tu es assaillis par l'odeur de la neige et du brouillard à laquelle se mêlent le parfum subtil des plantes au repos et les effluves puissantes des animaux de la forêt. C'est une réelle image odorante d'un sous-bois en hiver que te livrent ton nez avec une myriade d'informations sur la vie autour de toi : la mort, la faim, la maladie, la peur ...
Un violent frisson traverse tout ton corps.
La conscience
Tu prends soudain conscience de toi au milieu de ce monde sauvage. Tu es allongée sur le sol glacé, entièrement nue et complètement paralysée par les courbatures et le froid. Tu es seule. Tu réalises à quel point tu es terriblement vulnérable, peut-être même mourante.
La passion
La peur naît au creux de ton estomac et se propage dans tout ton corps en insufflant une étrange vie partout où elle passe. A la peur succède la panique. Tu t'agites et tremble de plus belle. Tu ouvres les yeux.
La vue
Tu es éblouie par une pâle lumière diffuse. Tu fermes les yeux rapidement. Tu essayes de les entrouvrir. Ta vision est floue. Tu lèves une main pour cacher la lumière. Ton bras tremble sous la douleur. Tu ne peux contenir tes larmes qui gèlent sur ta peau.
La lumière est partout, diffuse, blafarde et mouvante. Tu tournes la tête.
Tu es dans une petite clairière recouverte de neige au beau milieu d'une forêt profonde. Il fait nuit. Il te faut un moment pour réaliser que c'est la pleine lune qui diffuse cette étrange clarté livide à travers le feuillage et le brouillard.
Tu refermes encore les yeux et te recroqueville pour tenter de récupérer un peu de chaleur. Tua s le goût du sang dans la bouche.
L'idée de te laisser mourir là te traverse l'esprit. Tu sombres doucement... quand tu sens cette flagrante différente, chaleureuse et réconfortante. Une odeur familière et amicale.
Mémoire
Tu ne te souviens pas. Tu ne te rappelles de rien. Ni de ton nom, ni de ta vie, ni des circonstances qui t'ont amenés ici. Ta mémoire est presque vide. Le monde est une grande inconnue. Mais cette odeur a quelques choses d'évocateur. C'est une berge sur un océan inconnu.
Le Veneur
Tu ouvres les yeux de nouveau. La clairière est baignée dans la douce clarté de la lune. Un grand homme en noir entre dans le cercle des arbres. Il marche calmement en s'appuyant sur un grand bâton de bois tordu. Il porte un grand manteau jeté sur des épaules très larges. Ses cheveux sont blancs laiteux et tombent comme une cascade. Il est coiffé d'un grand chapeau à large bord. Tu ne parviens pas à mettre des mots sur les traits de son visage tant ils se font oublier derrière son regard. Ses yeux sans âges sont comme deux sources d'une eau chaude, claire et douce.
Il approche de toi. Tu te redresses et recules instinctivement contre le tronc d'un arbre. Tu ramasses tes jambes contre ton ventre et couvres du bras ta poitrine nue.
L'Homme porte sur le bras gauche une épaisse couverture. Il dit :
" Il va falloir me faire confiance ma soeur. Je suis venu pour te ramener à ta famille ".
Sa voix est un charme grave qui réconforte ton coeur et réchauffe ton corps.
Il déploie la grosse couverture. Il s'agenouille à tes cotés et te couvre de la pièce de laine avec des gestes rassurants. Tu ne peux rien faire, rien dire.
La couverture est d'abord douce puis lentement se remplit de chaleur. Tu t'abandonne et éclate en sanglot.
L'Homme te soulève dans ses bras comme une enfant et t'emporte à travers la forêt."
