Maeve looking for auntie III

Ce fut comme d'entrer dans la morgue d'une quelconque série policière - Maeve pensa à Navarro vu l'âge du local - car dans les murs de gauche et de droite étaient installés des "bacs à viande", grands tiroirs d'acier dans lesquels reposaient des corps. Dans la pièce se trouvait aussi une table à roulettes sur laquelle gisait un grand sac à machabée entrouvert, juste à côté d'un compartiment ouvert supportant le même genre de sac verdâtre. Les deux contenaient quelqu'un.

La Fiann trouva vite la source des odeurs de bière : le corps sur la table. Le pourri quant à lui venait d'un peu partout et principalement de l'autre cadavre que des mouches visitaient...

Troisième élément qui marqua, de stupeur cette fois, la jeune Garou : le petit personnage accroupi sur le bord du tiroir ouvert; il était vêtu d'une vieille robe de bure, un capuchon sur le visage ne laissant paraître que son menton pointu et sa peau laiteuse, des mains décharnées et griffues, aux ongles jaunis et abîmés, tenant un bâton tordu auquel pendait une série de crânes de rongeurs. La créature se frottait pensivement le menton, regardant probablement le corps sentant la Guiness, juste en face de lui. Un instant, sa langue sortit de sa bouche à la façon d'un serpent goûtant l'air : la sienne était cylindrique, grise avec des rayures bleu pâle.

" Toi, tu n'es pas morte... Que fais tu ici ? "

Maeve Brise-de-Feu comprit que cette chose qui venait de lui adresser la parole devait être un esprit matérialisé, elle le sentait faire des efforts pour parler un langage humain.

Les narines de Maeve se sentirent littéralement agressées par l’odeur de mort. Ses rares neurones en action se demandèrent où est-ce qu’elle était encore tombée. Bien sûr sa tante était morte, elle le savait, mais… c’était douloureux de le réaliser. Son corps se trouvait sûrement dans ce sac et elle le verrait bientôt ; supporterait-elle la vision de sa chère Credna bouffée par le temps et les vers ? Et il faudrait peut-être qu’elle regarde l’autre cadavre, dans le tiroir.
Heureusement, la forme crinos ne laisse pas éternellement le cerveau en action : il lui faut du concret, et vite. L’esprit arriva à point nommé.

Ami ou ennemi ? Maeve l’ignorait, mais jusqu’à présent les esprits avaient été plutôt gentils avec elle : Licorne et Marie-Pierre l’avaient bien aidée lorsqu’elle en avait eu besoin. Peut-être cette créature-ci était-elle un autre allié ? Quoi qu’il en était, Brise-de-Feu savait qu’il lui fallait être polie et respectueuse avec les créatures d’un autre monde dont elle ne savait pas grand-chose.

« Salut à vous. Moi chercher tante à moi. Honneur ma famille. » Articula-t-elle péniblement, gênée par ses énormes crocs. La jeune garou grogna, l’endroit sentait trop le ver pour qu’elle puisse déterminer si l’odeur venait de l’esprit ; mais elle tenta tout de même discrêtement de Voir la Vérité sur ses intentions à son égard…

La bestiole était bien un esprit, un esprit de la Mort, avec un grand "M" pour représenter qu'il s'agissait du concept de mort et non pas d'une quelconque entité en robe noire brandissant une faux. L'esprit désigna du doigt le corps qui sentait la bière, avec, Maeve s'en rendait compte, la vieille sueur aigre. Avec une pointe d'urine et de matière fécale. Ce qui n'était rien à côté de l'autre carcasse qui sentait purement et simplement la charogne.

" Je comprends, les morts sont importants. Méfie-toi de ceux qui, ici, marchent. "

Maeve, si elle avait été en forme humaine, aurait levé un sourcil interrogateur. Des morts qui marchent ? Ah oui… Comme celui qu’elle avait croisé tout à l’heure. Des… vampires. A cette idée la jeune Galliarde sentit ses poils se hérisser. Elle haïssait les vampires. Ils puaient le Ver. Et ils avaient voulu l’éloigner de sa tante.
Or, si l’esprit lui conseillait de s’en méfier, c’est qu’il ne pouvait pas être de leur côté. Brise-de-feu savait qu’elle avait des ennemis ou ne tarderait pas à s’en faire, mais jusqu’à présent, la Mort était neutre, non ?

Ce pouvoir que lui avait conféré son totem était en tout cas bien pratique. Elle songerait à la remercier dès qu’elle pourrait en, heu… accomplissant une bonne action quelconque. Elle verrait plus tard, dès que sa Tante aurait rejoins Gaïa dans des conditions de dignité optimale.

« Merci. Je suivrai conseil. » Grogna-t-elle en s’inclinant.

Tout en gardant l’esprit au coin de l’œil, elle se dirigea à pas lent vers le sac où reposait le corps sentant la bière – elle se moquait des autres odeurs, ne voulant reconnaître que celle-là – et l’ouvrit délicatement du bout de ses griffes.

Aucun doute possible, c'était Auntie. Pas rongée par les asticots mais plus pâle et plus rigide qu'avant. Quelqu'un avait trouvé bon de la nettoyer un peu et de lui donner meilleure apparence mais c'était le minimum qui avait été fait. L'esprit ajouta.

" Ils ont fait attention à elle, toutefois, je n'aime pas savoir qu'ils ont son épée, l'esprit qui y vit est malheureux. "

Maeve soupira de soulagement, les larmes aux yeux.

« Credna ! » Lanca-t-elle, soulevant doucement le corps froid pour le serrer entre ses pattes, prenant garde à ne pas le blesser. Elle lui avait tellement manquée, elle avait cru ne jamais la revoir ; pourtant ce n’était pas vraiment elle non plus. Sa tante était une irlandaise de souche, mais son teint n’avait jamais été aussi blanc et elle se sentit très triste à l’idée que ses grands yeux verts ne brillaient plus jamais de leur saine et habituelle colère.

Puis la voix de l’esprit lui parvint, comme de très très loin, alors qu’elle contemplait ce visage si familier. Ah, oui, l’épée, bien sûr. Fuilteach. Il fallait retrouver l’épée, c’était ce pourquoi elle était venue. Maeve reposa délicatement le corps de sa tante dans le sac vert, puis prit un instant pour réfléchir.
Elle ne pouvait pas emporter le corps de Tatie avec elle. Son combat risquait d’être dangereux, elle pouvait même y laisser la vie. Elle ne voulait pas mêler la dépouille à ça, surtout qu’elle risquait de l’encombrait. Et puis l’esprit devait respecter les cadavres, non ?

Tournée vers lui, la garou posa un genou à terre, en espérant qu’il comprenne ses baragouinement. Si elle ne se sentait pas tellement en danger, elle aurait vraiment repris forme humaine…

« Moi supplier vous. Vous garder ma tante. Moi chercher et prendre épée. Moi revenir, prendre épée et tante et partir. Moi respecter esprit dans épée. Fuilteach toujours protéger famille à moi. Moi être redevable pour vous et Fuilteach. »

L'esprit secoua son bâton, les crânes firent un bruit de claquettes morbide.

" Je ne peux qu'accéder à ta requête, ce corps n'est pas à sa place ici. Il mérite des funérailles décentes et saines. Et tu pars libérer un Fétiche des mains des Morts-Qui-Marchent. Cela aussi, je l'apprécie. Va, je veillerai sur cette dépouille. "

La langue de l'esprit sorti une fois de plus de sa bouche dans un sifflement ignoble et l'air s'alourdit, les odeurs de tombe se firent plus prenantes, l'éclairage diminua et une sorte de vapeur bleuâtre emplit l'air. Cela sentait l'encens.

Beaucoup de livres classiques, dont de très vieilles éditions, des ouvrages scientifiques dépassés... Une bouteille de vin et deux verres, dont un seul remplit. Pas d'épée.

Derrière la petite porte, une petite pièce, tout aussi bien agencée que la précédente, à ceci près que lespace est beaucoup plus réduit et que l'endroit n'est pas dédié à la littérature mais au combat : diverses armes, anciennes et modernes, sont bien rangées sur des râteliers. Le local est éclairé par une simple ampoule.

Une des épées est clairement de style irlandais...

[Et si tu veux une autre arme en bonus, t'as un choix sympathique, y compris des armes à feu. Mais ça reste du type pistolets-revolvers-épées-dagues]

[HJ : Bon sang mais j'arrive pas à faire des messages de plus de cinq lignes en ce moment... ;_; Et j'ai toujours ma hallebarde ]

Maeve sourit. Malgré le Ver, malgré les cadavres, malgré la fatigue, la faim et la sueur, elle arrivait encore à se sentir chez elle parmi un foutoir pareil. Elle en déduisit que c'était l'esprit dans l'épée qui l'appelait, qui chuchotait à son oreille une mélopée du pays pour mieux attirer son attention. Si elle trouvait l'arme enchantée ici, elle serait très satisfaite, car elle n'aurait plus à tuer et pourrait enfin faire son deuil tranquille (et accessoirement dormir une semaine).

La jeune Garou savait qu'elle n'était pas du bon auspice pour dialoguer avec l'Umbra. D'un autre côté, si l'arme-fétiche qu'elle recherchait était malheureuse ici, elle n'aurait qu'une seule envie : la suivre, parce que Brise-de-Feu était zeeeentille moins marquée par le Ver.

Sans (trop) de crainte, elle se saisit du Croc de Fenris qu'elle devinait être celui de Tata - c'était l'une des plus grosses lames à une main sorti un jour d'une armurerie Garou, et la jeune irlandaise avait un peu de mal à la soulever avec un seul poignet - et interrogea ses sens. Esprit, esprit, es-tu là ?

[Allez, je me remets dans le bain !]

Bien que Nick fut parfaitement capable de se faire discret, il n'en avait vraiment pas envie en ce moment, alors qu'il montait les marches d'un escalier puis l'autre, traversant des pièces qu'il trouvait bizarre - quand il prenait le temps de regarder autour de lui - jusqu'à rejoindre ce qui avait l'air, et bien, d'une pièce, également mais d'un tout autre standing que les rpécédentes. Le plus marquant était cependant la Garou plantée juste devant lui, voulant visiblement descendre els escaliers que le Théurge venait de monter.

Le regard perdu dans une contemplation lointaine, Nick resta, la main sur la poignée de la porte, immobile plusieurs secondes avant de déclarer, comme s'il saluait quelqu'un dans la rue...

- Salut Maeve ! On est venu te chercher.

"On", oui, car Pierre était juste derrière le Wendigo. Rêveur, déjà reparti vers se spensées, se dit qu'il devrait se trouver une veste. Son tee-shirt était cool mais une veste serait sûrement fun. Peut-être aussi, enfin, surtout, trouver une saoche plus adaptée à la ville que son vieux machin en cuir. Il avait de quoi le remplacer chez lui... Ah, oui ! Passer voir sa famille, ce serait une bonne idée. Il n'était pas parti depuis longtemps, de toute façon, hein ?

[HJ: passage éclair et oh combien utile vous allez voir!]

Bon, jusqu'à présent ça ne se passait pas trop mal. Ils avaient discuté avec des corbeaux, étaient passé par les égouts, avaient éclaté (littéralement) quelques zombis et continuaient leur bonhomme de chemin. Par contre, vers où, pour trouver quoi, là était la question.

Enfin bon, le Théurge avait l'air de savoir où il allait, c'était le principal. Au pire, ils auraient fait une visite du Paris "underground". Ca montait, ça descendait, et y'avait des meubles aristocratiques... dans les égoûts!? de mieux en mieux. Et pourquoi pas Disneyland tant qu'on y est!
Rêveur stoppa net (d'aileurs Pierre faillit lui rentrer dedans) et parla à quelqu'un qu'il apercevait à peine vu que le Théurge était en plein dans l'encadrure de la porte...
Visiblement, ils venaient de retrouver la chef. Au moins, ça c'était fait. Par contre, rentrer serait peut-être moins facile vu le barouf qu'ils faisaient et le standing inhabituel de ces égoûts qui devaient par conséquent être habités.

Pierre voulant au moins savoir à uoi ressemblait le chef, se mit sur la pointe des pieds en essayant de voir par dessus l'épaule de son compagnon.

"Heu. salut, enchanté Maeve. Moi c'est Pierre. Apparemment, tu es la chef de cette meute?"

Maeve s'arrêta en entendant des pas dans sa direction. Encore des ennemis ? Encore un combat ? Elle était fatiguée... Elle se mit pourtant dans une garde à peu près correcte; elle venait de détruire deux créatures du ver, de récupérer une arme familiale et avait conclu un pacte avec un esprit de la Mort. Qu'est-ce qui pourrait l'abattre ? Que devrait-elle craindre ?
Il y a deux jours encore, elle n'était qu'une lycéenne, et désormais elle comptait au rang des machines à tuer. Seulement elle ne voulait pas tuer, elle ne voulait pas faire la guerre, tout ce qu'elle désirait, c'était...

Nick déboula sur ces entrefaits et la salua comme s'ils venaient de se croiser au lycée. Elle le reconnut sans peine, contrairement au jeune homme qui le suivait et qu'elle ne connaissait pas.

* Mais qu'est-ce qu'ils foutent là, eux ? * Fut sa première pensée en les voyant, mais ils y répondirent immédiatement : la chercher, hein ? Le caern les envoyait ? Brise-de-Feu s'en souvint. Sa tante. Le caern. La guerre. Sa quête.
Elle ne les suivrait pas.

« Ah, heu, cool. Sauf que je ne me souviens pas avoir demandé de l'aide. » Répondit-elle d'un ton morne en les dépassant, se dirigeant vers la morgue où l'attendait tatie.
« Je ne veux plus rien avoir à faire avec le caern, les garous and all that shit. Désolée pour le déplacement et la désertion, mais j'ai une vie, moi. » Expliqua-t-elle en ouvrant la porte de ladite morgue, où, espérait-elle, veillait toujours la Mort.

- Hein ? Mais...

Rêveur-des-Prairires laissa Maeve le dépasser et ouvrir en grand la porte de la... Morgue ? Nick pencha la tête de côté, s'accrochant au cadre de la porte pour ne pas tomber en avant. Le jeune homme fut rassuré de voir qu'il y avait un esprit installé dans la pièce. En fait, seule cette information lui suffisait. A l'odeur et à la vue, il ne détectait pas l'impression désagréable qu'il s'agissait d'un lieu corrompu et pour Nick, tout ce qui était spirituel sans être du Ver était forcémment bien, dans un sens ou dans l'autre. Si en plus Maeve entrait tranquillement dans la chambre froide sans s'inquiéter...

Par contre, Maeve Brise-de-Feu, justement, posait problème : elle ne voulait pas revenir. Nick s'avança vers elle.

- Mais c'est justement le Caern et les Garous notre vie ! Il y a tellement d'êtres qui attendent que nous agissions ! Gaïa, les Anciens, nos Totems et tous les esprits de la Nature ! Et pour ceux dont la famille est au courant... Et bien, la famille ! Ma Grand-Mère ne voudrait pas que je reste à la maison à me tourner les pouces alors que je dois affronter le Ver et ses serviteurs ! Et quand je parle de Grand-Mère, je pense autant à celle que mon père a traîné hors de sa réserve qu'à celle qui nous a donné la vie à tous : Gaïa ! Et les Totems ? Wendigo et Grand-Père Tonnerre comptent sur moi ! Ce n'est sûrement pas pour rien que je suis devenu un loup-garou, ces deux esprits espèrent me voir combattre en les vénérant chacun avec autant de ferveur, je suis métis de sang mais aussi d'esprit ! Ma spiritualité est de deux mondes... Nous sommes trop peu nombreux pour pouvoir nous permettre de laisser partir le moindre Garou !